Bienvenue sur Terre - par Iniourfeïss

**Tiré des bas-fonds de son appartement, Boris, scénariste passionné d’astronomie et avide de rencontres extraterrestres s’apprêtait à énoncer un discours d’accueil en leur honneur. Même étant prêt à tout pour leur serrer la pince une fois dans sa vie, il avait mis un bon moment à accepter l’offre de venir se présenter devant ces étrangers, acceptant sous la menace d’un « Je peux toujours trouver quelqu’un d’autre, si vous ne me croyez pas. »

**– « Je suis fort déstabilisé à l’idée de réaliser que je vous rencontre enfin. Je vais commencer par vous souhaiter la bienvenue sur notre planète, la Terre. J’avais certes préparé un discours pour votre arrivée, un discours qui a passé toute la batterie de contrôles jugeant sa droiture, sûr, sans prétention, sans défaut, mais tellement vide, banal et non exhaustif de notre véritable savoir.
**Je me permets donc de vous en exprimer un plus vrai, plus informé.
**L’Homme a toujours été captivé par ce qu’il ne comprenait pas, par ce qu’il ne pouvait voir, toucher, goûter, découvrir en vérité. Il suffit de lui interdire pour qu’il s’intéresse.
**Dévoré par les mystères que renferment les étoiles, lorsqu’on m’a proposé de vous accueillir, je n’y croyais pas, convaincu qu’on se moquait de moi, comme dans un rêve. Et me voilà devant vous, imperturbable par votre physique que j’ai si longtemps étudié. Un physique que j’ai pu observer sur de nombreuses fresques, sculptures ancestrales. Ce long crâne, bien plus massif que le nôtre, devrait, si je m’en réfère aux hypothèses actuelles, renfermer une bien plus grande intelligence que la nôtre.
**Dans le premier discours, je ne parlais pas de votre première venue, car même si quelques-uns d’entre nous en étaient persuadés, ils refusaient de l’avancer, par peur de se tromper, de vous irriter par leur prétention. Mais j’ai un regard différent sur la chose. Pourquoi craindre de froisser un être plus évolué spirituellement que nous ? Seuls ceux qui sentent leur intelligence menacée se braquent et la perdent totalement l’espace d’un instant.
**Je devine la peur dans les yeux de mes confrères, effrayés à l’idée que je dirige solitairement le discours. Je les comprends, mais je trouve que cela manque de logique. Nous sommes tous conscients que ce discours n’altèrera pas votre objectif, qu’il soit pacifique ou violent, et vous avez pu voir que le nôtre était pacifique. Ainsi, tout dépendra de votre but de base, car actuellement, même si je vous insultais, grâce à votre savoir vous pourriez ignorer mes mots, sachant que nous ne sommes pas une menace pour vous.
**Je tiens donc à rassurer tout le monde sur mes paroles. Je ne ferai rien capoter. Mon discours, ne soyons point hypocrites, n’est que politesse.
**Ainsi, je vous salue, étrangers de l’espace, et vous souhaite, quelques millénaires plus tard, une nouvelle fois la bienvenue. »

**Quelque peu sous le choc, le public humain se décida tout de même à réagir, et à applaudir. L’unique extraterrestre, aux portes de son vaisseau, fixait de ses yeux profonds Boris et émit un sourire amusé par l’audace de l’homme.
**– Il y a un malentendu. D’ailleurs, cela me déstabilise fortement moi aussi. Je suis comme un dératiseur, comprenez-vous. C’est assez triste, car je peux comprendre votre langue, vos souhaits, vos désirs. Je pourrais même discuter longuement à vos côtés. Mais je suis au bas de mon échelle sociale, et ainsi j’ai dû accepter de pratiquer des tâches ingrates pour pouvoir loger ma famille.
**– Comment ça ? répondit Boris, faisant semblant de ne pas comprendre.
**– Vous vivez des événements similaires à chaque instant sur votre planète. Vous vous débarrassez des vermines telles que les rats ou les fourmis, mais vous ne les comprenez pas, ainsi, vous vous pardonnez. C’est votre excuse. Mais quand vous provoquez des génocides avec votre propre espèce, vous accusez le passé ou la contrainte. On trouve toujours un moyen de se pardonner. Sachez que c’est identique pour moi. Vous me disiez tout à l’heure que l’Homme est captivé par la connaissance, alors je vais vous informer de la cause de votre fin sur cette planète. Votre Terre appartient à un être nommé Dieu.
**Les yeux s’écarquillèrent. Religion et science n’étaient réellement jamais très loin.
**– Il a très vite remarqué que vous étiez en train de ruiner ses terres. Et ne pouvant plus gérer la pullulation, il a décidé d’utiliser des moyens plus tragiques, c’est-à-dire moi. Au début, j’avais posé des pièges en forme de pyramides que vous avez mal interprétés, comme il était prévu. Et puis Dieu fut dévoré par la culpabilité. Alors il proposa de vous éduquer en vous délivrant un code de conduite, que vous avez respecté un temps, puis perverti et enfin oublié. Alors, je suis là, reprenant le plan d’origine.
**– Vous êtes prêt à éradiquer une espèce pensante ?
**– Autant qu’une non pensante, pourquoi devrais-je la privilégier, surtout quand elle est un fardeau ? De plus, je vous ai dit que ma culpabilité s’effacerait devant des prétextes identiques aux vôtres. Dîtes-vous, pour votre bonne conscience, que vous ne pouvez rien faire devant ma puissance et que, modestement, vous récoltez un châtiment mérité.
**– C’est impossible.
**– Je vous comprends, malheureusement.
Et l’extraterrestre retourna dans son vaisseau qui ne tarda pas à s’élever dans les cieux. Boris emmagasina l’information et comprit qu’il n’était réellement qu’une fourmi.
**– Et merde…

Fin

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Sujet du deuxième concours : Les extraterrestres ont débarqué sur terre ! On se prépare pour les recevoir en grande pompe. Et, stupéfaction, on vous a choisi pour le discours d'accueil !
Vous allez devoir serrer la main de ces habitants venus d'ailleurs puis déclamer votre tirade devant des millions de spectateurs. À vous de nous raconter comment ça se passe !